TAHITI
PACIFIQUE MAGAZINE, n° 180, avril 2006 : Ce livre de Mathias Chauchat
est un remède contre l'asthénie insulaire. Il est
frappant qu'il ne soit question dans l'outre-mer que de cadeaux
fiscaux et de nouveaux chèques à signer. Alors
que la France connaît une crise financière, politique
et morale qui n'a guère de précédent, on
vit outre-mer dans un monde virtuel, s'éloignant de plus
en plus du monde réel. Bref, les îles insouciantes
sont à la veille d'un tsunami, financier cette fois.
L'intuition originelle des auteurs
est de réfléchir à la fois aux conséquences
inévitables de la « nouvelle pauvreté »
de l'Etat qui va faire cesser prochainement l'injection aveugle
de crédits publics et à ce que pourrait concrètement
signifier une préparation à l'émancipation
de la Nouvelle-Calédonie ce qui, il faut le rappeler,
est but commun aux trois partenaires (Etat, Indépendantistes
et Rassemblement) inscrit dans l'accord de Nouméa [1998].
Trois thèmes sont proposés : institutions,
finances publiques et économie. […] L'ouvrage aborde
ainsi les trois questions de la collégialité,
une des clés du système politique calédonien,
de la fiscalité, une des clés de la construction
citoyenne et des surrémunérations publiques,
une des clés de la dépendance.
Or en Nouvelle-Calédonie
on vit aujourd'hui, selon les auteurs, une cécité
étonnante. Pourquoi s'inquiéter alors que les usines
de nickel amèneraient la prospérité ?
C'est justement le moment pour faire des réformes. La
bonne conjoncture actuelle repose sur des facteurs multiples
qui, actuellement, se conjuguent, mais ne resteront pas liés
indéfiniment : les transferts croissants de la France
aux ménages, les cours élevés du nickel,
la bulle immobilière avec des taux exceptionnellement
bas, un certain flux migratoire et l'oubli du risque politique
en Nouvelle-Calédonie, particulièrement pour les
jeunes et les nouveaux arrivants. Ces facteurs ne s'additionneront
pas éternellement. Il faut préparer l'avenir, anticiper
les retournements de conjoncture pendant que c'est possible,
sinon facile. La construction des usines doit fournir le déclic
qui a manqué jusqu'à présent. […]
C'est un livre de solidarité,
de justice sociale et l'amorce d'une vraie réflexion sur
le « destin commun calédonien »
auquel nous invite l'accord de Nouméa, au-delà
des profondes inégalités historiques, ethniques,
patrimoniales et culturelles du Caillou comme des discours nébuleux.
Pierre Vérin
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SOMMAIRE
(résumé) |
Introduction
Ch. I — La collégialité
contre le désordre
[...]
La collégialité calédonienne suggère
l'existence d'un « droit de veto implicite »
des grandes formations sur une décision de l'exécutif,
lorsqu'elle susciterait une hostilité manifeste, et d'une
retenue parallèle de celui-ci à passer en force
sur un tel dossier. Retenue majoritaire et veto minoritaire sur
l'essentiel, c'est sans doute là l'équation possible
de la démocratie de concordance. Il revient aux élus
de forger ensemble une « coutume constitutionnelle »,
qui sera unanimement acceptée parce que considérée
comme la règle de droit.
p. 16
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- Un exercice de concordance
- La collégialité
contre le régime d'assemblée
Ch. II — Construire
la citoyenneté par la réforme fiscale
[...]
Il conviendrait de remodeler l'impôt sur le revenu, créer
une cotisation sociale généralisée sur tous
les revenus, sortir de la fiscalité de « porte »
par la TVA et mettre fin aux absurdités des niches fiscales.
La défiscalisation, loin d'être un instrument magique,
est le moyen le plus efficace pour transformer de l'argent public
en argent privé, sans construire rien de durable.
p. 65
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- Le retour au civisme fiscal
par la simplification de l'impôt
- La suppression des « niches
fiscales »
Ch. III — Désindexer
pour un développement durable (Mathias Chauchat
et Cécile Perret)
Ce sont bien les administrations
publiques qui contribuent d'abord au PNB calédonien. Le
secteur de la mine « de l'île métallurgique »
n'y participe qu'aux alentours de 10 % avec de fortes variations
conjoncturelles. L'agriculture est devenue marginale. L'économie
calédonienne reste une économie de la rente publique.
Comme la France est droguée à l'emprunt, la Calédonie
est « accro » à l'indexation.
Les surrémunérations sont un héritage de
la France d'outre-mer. Elles coûtent de plus en plus cher
à une France de plus en plus endettée. Donner toujours
plus aux ménages est un mauvais instrument de développement.
Il faut avoir le courage d'y mettre fin pour construire une économie
fondée sur le réel. Le renforcement d'une base
industrielle du pays par la construction des usines de nickel
pourrait permettre de fournir le déclic qui a manqué
jusqu'à présent.
p. 137
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- Un mauvais instrument de développement
- Lutter contre les surrémunérations
Annexes
- La « petite »
alternance du 9 mai 2004 : une instabilité pour durer
- L'unité de commandement
- Règlement intérieur
du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie adopté
le 22 juillet 2004
- Note de service de la présidente
du gouvernement du 30 août 2004 sur le fonctionnement du
gouvernement
- Le corps électoral en
Nouvelle-Calédonie
- La situation des fonctionnaires
de l'État en Nouvelle-Calédonie
Bibliographie
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