Vénus et la
mer / Lawrence Durrell ; trad. de l'anglais par Roger Giroux.
- Paris : Librairie générale française,
1993. - 282 p. ; 17 cm. - (Le Livre de poche,
Biblio, 3193).
ISBN 2-253-06342-8
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NOTE DE L'ÉDITEUR : Lawrence Durrell ne s'était
jamais remis du malheur d'être né « le
petit filleul de Hamlet ». Pour soigner cette « terrible
rage de dents qu'est l'existence anglaise », il n'avait
trouvé qu'une méthode : voyager, fuir à
tout prix l'Angleterre, ce pays qui, disait-il à Henry
Miller, l'avait dépossédé de lui-même,
avait essayé de détruire ce qu'il y avait en lui
de singulier, d'unique.
Comment s'évader quand
on fait partie de « l'aristocratie la plus impécunieuse
du monde », celle qui vit du respect que lui rapportent
les divagations imprimées ? Nous sommes à
la fin de la Seconde Guerre mondiale. En tant qu'officier chargé
de l'Information, Durrell doit se rendre à Rhodes. […]
A Rhodes, Durrell crée
un journal en trois langues […] ; il travaille avec des
Grecs, des Italiens, des Turcs. Il est exilé participant,
voyageur citoyen. […]
Rhodes, au lendemain de la guerre,
est une « île délicieuse posée
sur une mer d'inquiétude politique ». A Henry
Miller, Durrell écrit sa surprise devant le décor
qu'il trouve en débarquant. Les Italiens qui ont occupé
l'île se sont transformés en arrangeurs de paysage :
« Il y a ici un ordre décoratif et un soin
apporté au détail qui sont proprement faits pour
rendre fous les Grecs ». Et de décrire l'île
de Rhodes comme une comédie de Shakespeare, pleine de
féerie, où la superstition le dispute à
la sagesse.
[…]
☐ Linda Lê
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INCIPIT |
J'ai découvert un jour
dans les carnets de Gideon une liste de maladies que la science
médicale n'a pas encore reconnues, et où figurait
le mot Islomanie, désignant une affection de l'esprit
qui, pour être rare, n'en était pas moins bien connue.
Il y a des gens, disait Gideon en guise d'explication, sur qui
les îles exercent un attrait irrésistible. Le seul
fait de se savoir dans une île, dans un petit univers entouré
par la mer, les remplit d'une ivresse indescriptible. Ces « islomanes »,
ajoutait-il très sérieusement, sont les descendants
directs des Atlantes, et c'est vers l'Atlantide disparue que
leur existence insulaire tend tous leurs désirs secrets …
J'ai oublié les autres détails, mais comme toutes
les théories de Gideon, celle-ci était ingénieuse.
[…]
Ce livre se propose une sorte
d'anatomie de l'islomanie ; que le lecteur se rassure pourtant,
ce ne sera pas un lourd et savant traité de la maladie
en question, mais un ouvrage quelque peu décousu fait
de conversations inachevées, de voyages projetés
et jamais effectués, de notes et d'esquisses rassemblées
en vue de livres qui ne seront jamais écrits …
Il est dédié à la déesse tutélaire
d'une île grecque : Rhodes. Et j'aimerais faire revivre
quelques heures de ces années merveilleuses dont le souvenir
m'emplit de nostalgie lorsque je reçois une lettre portant
un timbre grec ou lorsque, dans un port étranger, je vois
flotter au mât de quelque cargo, le pavillon bleu et blanc
de la Grèce.
☐ pp. 9-10
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COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE | - « Reflections on
a marine Venus : a companion to the landscape of Rhodes »,
London : Faber & Faber, 1953
- « Vénus et
la mer », Paris : Buchet Chastel, 1962
| - Lawrence Durrell, « L'île de
Prospéro », Paris : Buchet Chastel, 1962,
1991 ; Librairie générale française (Le Livre de poche, Biblio, 3194), 1993
- Lawrence Durrell, « Citrons acides »,
Paris : Buchet Chastel, 1961, 1995 ; Librairie
générale française (Le Livre de poche, Biblio,
3213), 1994 ; Paris : Phébus (Libretto, 371), 2011
- Lawrence Durrell, « Les îles grecques », Paris : Albin Michel 1970 ; Bartillat, 2010
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mise-à-jour : 30 mars 2016 |

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