Robert Lafont

L'icône dans l'île, trad. de l'occitan par Philippe Gardy et Bernard Lesfargues

Fédérop

Lyon, 1982

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Méditerranée
L'icône dans l'île / Robert Lafont ; traduit de l'occitan par Philippe Gardy et Bernard Lesfargues ; préface de Jean-Marie Auzias. - Lyon : Fédérop, 1982. - 131 p. ; 18 cm.
ISBN 2-85792-017-2
Durant l'été 1971, un groupe disparate — vacanciers français, pêcheurs et paysans grecs — séjourne sur une petite île au nord de la Crète quand, après une tentative de coup d'état militaire en Egypte, s'amorce une dévastatrice réaction en chaîne : tentative d'invasion des uns, riposte de moins en moins graduée des autres — Tel-Aviv et Bagdad sont atomisées puis, au fil des informations égrenées par la radio, la Corée du Nord, Cuba, New York, … Au-dessus de l'île, le ciel s'embrase ; autour de l'île, la mer se déchaîne. Jour après jour, les maigres ressources en eau et en nourriture se raréfient et se corrompent ; les rescapés tentent cependant d'organiser les conditions d'une improbable survie.

La fable de Robert Lafont emprunte à plusieurs genres, comme pour mieux se démarquer de chacun : si l'écriture est contemporaine des faits relatés (1971), la mise-en-scène de l'apocalypse atomique peut relever de la science-fiction (de la politique-fiction ?) ; s'il n'y a pas naufrage, les péripéties des survivants sont bien celles d'une robinsonnade ; quant à la visée utopisante, elle semble paradoxalement soulignée par l'absence de toute perspective raisonnable de mise-en-œuvre.

L'épilogue, où l'on voit un équipage de piroguiers africains secourir les derniers survivants de l'île — un Français, qui a tenu la chronique du désastre, et Athanassia, une jeune Grecque — désigne sans équivoque le lieu d'un éventuel salut pour une humanité à la dérive … comme en réponse à l'énigmatique présence parmi les décombres de l'icône, un portrait de Malcolm X 1.
       
1.“ L'icône dans cette île c'est, trouvé dans la tempête, un portrait de Malcolm X, le martyr de la négritude, qui annonce par avance l'arrivée d'une barque de Maliens. Prophétie. Image-signe : et ce n'est pas celle d'un Dieu à quoi tant de prophètes d'une Occitanie théocratique voudraient, fût-ce la mitraillette au poing, nous amener. ” — Jean-Marie Auzias, Préface, p. 10.
NOTE DE L'ÉDITEUR : L'auteur, Robert Lafont, est connu pour son action inlassable en faveur de l'Occitanie, de la reconnaissance de sa culture et de sa dignité. Il est l'auteur de nombreux ouvrages savants ou de divulgation publiés chez Gallimard, Flammarion, Seghers, Albin-Michel, Privat, etc. Professeur à l'Université Paul-Valéry, Montpellier, il est spécialiste de socio-linguistique. Son œuvre de créateur en langue occitane — poèmes, théâtre, nouvelles et romans — est plus qu'importante. L'Icône dans l'île est le premier roman de Robert Lafont — « fable », préfère-t-il l'appeler — à être traduit en français.
EXTRAIT

Alors que je m'abandonnais de la sorte au ciel et à la mort, dépouillé de toute attente, une sorte d'espoir, un rêve naquit en moi. J'imaginais d'autres hommes qui survivaient, sur d'autres îles, sur les rivages de la Crète, peut-être le berger abandonné par Leif. Leif lui-même continuait à errer sur la mer. Nous nous rencontrions et, avec un peu de vie végétale oubliée, sur un morceau de terre que le désastre aurait épargnée, nous recommencerions l'humanité. Nous formerions une communauté de Robinsons, pacifique et heureuse, où les femmes pourraient nous donner des enfants. Quand je sentais que j'allais sombrer dans le sommeil, je posais la main sur mon ventre, comme on dit que le faisaient dans les temps anciens les races menacées ou les fuyards perdus dans les déserts. Je passais alors de longs moments à réfléchir sur la façon de bâtir une tente, de semer un peu d'orge ; je songeais que l'orge, année après année, se multiplie jusqu'au jour où il est enfin possible de battre le grain, de le broyer, de pétrir la première galette et de la faire cuire entre des pierres. J'écoutais le pas de la pluie sur la terre bêchée, sur l'herbe tendre qui pousse, sur le feuillage dur des oliviers. J'attendais la venue des hommes et des femmes au moment même où j'attendais la mort … Si j'étais mort à cet instant, je sais que je serais mort consolé.

pp. 94-95

COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • « L'icòna dins l'iscla (faula) », Toulouse : Institut d'estudis occitans, 1971, 1979

mise-à-jour : 1er juillet 2009
Né à Nîmes le 16 mars 1923,
Robert Lafont est mort
à Florence le 24 juin 2009.

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