EXTRAIT

Marcher indéfiniment, sans jamais recroiser ses propres pas, lui apparaît comme absurde. Alice réfrène donc l'envie de revenir en arrière et se rend à l'avis de l'ange qui la pousse vers la forêt. Mais, aussitôt la décision prise, l'hésitation quant à l'endroit où franchir le rideau de lianes vire à l'angoisse. Alice se mord la langue, lance des galets aux oiseaux, des injures aux dieux et aux sauveteurs toujours invisibles. Cette crise se résout heureusement assez vite par un écroulement semblable à celui qui suit une transe. Recroquevillée de la pointe des doigts aux orteils, genoux ramenés contre la poitrine et serrés entre ses bras, Alice se balance en gémissant, tandis que Zéphir tourne autour de cette boule de nerfs rétrécie et durcie. État excessif et provisoire. Toutefois, lorsqu'Alice se relève molle et rompue, angoisse, rage et désespoir ont relâché leur étreinte. Plus légère, dépouillée de cette autre elle-même qui renâclait devant l'effort, elle est maintenant près d'entreprendre l'incursion à l'intérieur des terres. ☐ pp. 63-64