Yannick Fer et Gwendoline Malogne-Fer

Tuaroí : réflexions bibliques à Rapa, conversion et identité

Haere po

Papeete, 2000
bibliothèque insulaire

     

édité à Tahiti
parutions 2000
3ème édition du Prix du Livre Insulaire (Ouessant 2001)
ouvrage en compétition
Tuaroí : réflexions bibliques à Rapa, conversion et identité / Yannick Fer et Gwendoline Malogne-Fer. - Papeete : Haere po, 2000. - 306 p. : ill. ; 22 cm.
ISBN 2-904171-48-7
NOTE DE L'ÉDITEUR : Isolée au sud de l'océan Pacifique, à 4 jours de bateau de Tahiti, l'île de Rapa, si lointaine, occupe encore aujourd'hui une place à part dans l'imaginaire polynésien.

Au pied de montagnes « si étrangement découpées qu'elles ont l'apparence de montagnes abruptes et de tours crénelées », la culture rapa s'enracine dans une terre préservée, résonne en des chants impressionnants et s'illustre par un tressage d'une grande finesse.

Quatre-vingt-dix ans après le séjour d'Eugène Caillot 1, trente ans après celui d'Allan Hanson 2, ce livre nous emmène au cœur de l'identité rapa et donne la parole aux hommes et aux femmes de l'île, par la transcription de dix tuaro'i ou réunions paroissiales consacrées à l'interprétation des versets de la Bible : jeux d'esprit, joutes oratoires, la communauté rassemblée y élabore, par le tressage continu de la religion, de la tradition et du quotidien, une identité à la fois authentique et moderne, comme les trois brins d'une corde qui, à la fin, n'en font qu'un.

En analysant ces relations entre l'identité rapa et la Bible, les auteurs proposent des clés pour mieux comprendre la particularité d'un protestantisme polynésien, la profondeur d'une conversion et la préservation de la culture d'une île du Grand océan.
       
1.Eugène Caillot, « Histoire de l'île Oparo ou Rapa », Paris : Ernest Leroux, 1932
2.F. Allan Hanson, « Rapan lifeways : society and history on a Polynesian island », Boston : Little, Brown, 1970 ; « Rapa, une île polynésienne hier et aujourd'hui », Paris : Sté des Océanistes (Publications de la Sté des Océanistes, 33), 1973
EXTRAIT Une (…) méthode pour s'assurer que la religion adoptée est bien la bonne consiste à regarder « ailleurs », à l'autre bout du monde rapa. Le caractère universel du christianisme, ses millions de fidèles à travers le monde démontrent que le Dieu chrétien est le vrai dieu, que les Rapa ont fait le bon choix.

L'appartenance de la Polynésie française à la République française pose aux Rapa un problème supplémentaire : doit-on respecter toutes les lois de la même façon, celles de Dieu comme celles de la République ? Toutes les lois ne sont pas perçues comme des règles absolues, impératives. Ainsi en est-il du cadastre français, qui non seulement n'est pas appliqué mais dont l'application relèverait sans doute de « l'illégalité ».

« À Rapa, les terres ne sont pas cadastrées. C'est ce qu'il faut faire. Il ne faut pas qu'il y ait des propriétaires des terres » (…).

Par contre, lorsque le maire, qui représente l'État dans sa commune, sanctionne un Rapa qui avait pêché dans une zone interdite, la sanction est vécue comme juste et nécessaire. L'hypothèse suivante peut être formulée : ne sont perçues comme de véritables lois que celles qui assurent la subsistance, l'Abondance. Alors que la loi cadastrale morcelle la terre nourricière, l'interdiction de zones de pêche permet au contraire de préserver la faune marine de tout risque de pêche intensive.

L'autorité (politique ou religieuse) ne fait donc pas la loi. Il est probable que lorsque les pasteurs abordent des thèmes comme la drogue ou la contraception, leurs recommandations sont considérées comme moins impératives : dans un cas le paka est présenté par les Polynésiens comme une plante, une nourriture comme les autres, dans l'autre la contraception va à l'encontre de la volonté divine d'Abondance (« Croissez, multipliez » rappelle Tepua […]). Par contre, lorsque les pasteurs dénoncent le système éducatif polynésien, l'argument a force de loi : les enfants, désormais habitués à la cantine scolaire reviennent chez eux en disant de la nourriture : « C'est dégueulasse ». L'insulte est sacrilège.

Les lois qui concernent de près ou de loin la nourriture, donc l'Abondance, se retrouvent, exprimées dans des formes similaires, dans la Bible et dans la vie sociale rapa.

Paulina : « Dans les familles on voit souvent la même interdiction que celle donnée par Dieu à Adam : ne pas toucher au fruit défendu » (…). Ces similitudes de forme, doublées parfois de correspondances sur le fond, entre les textes bibliques et les règles traditionnelles polynésiennes, autorisent des combinaisons synchrétiques très variables.

pp. 113-114
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • Yannick Fer et Gwendoline Malogne-Fer (dir.), « Anthropologie du christianisme en Océanie », Paris : L'Harmattan (Cahiers du Pacifique sud contemporain), 2009
  • Yannick Fer, « Pentecôtisme en Polynésie française : l'évangile relationnel », Genève : Labor et Fides, 2005
  • Yannick Fer (dir.), « Diasporas asiatiques dans le Pacifique : histoire des représentations et enjeux contemporains », Paris : Les Indes savantes, 2014
  • Gwendoline Malogne-Fer, « Les femmes dans l'Église protestante ma'ohi : religion, genre et pouvoir en Polynésie française », Paris : Karthala (Mémoire d'églises), 2008
site internet de Gwendoline Malogne-Fer
site internet de Yannick Fer

mise-à-jour : 18 août 2017

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