Jacques Nicole

Au pied de l'écriture : histoire de la traduction de la Bible en tahitien

Haere po no Tahiti

Papeete, 1988

bibliothèque insulaire

   
édité à Tahiti
Au pied de l'écriture, histoire de la traduction de la Bible en tahitien / Jacques Nicole. - Papeete : Haere po no Tahiti, 1988. - III-338 p.-[12] f. de pl. : ill., cartes ; 29 cm.
ISBN 2-904171-18-5
NOTE DE L'ÉDITEUR : A Tahiti, 30 ans après les marins de Cook et 10 ans après les mutins de la Bounty, débarquent le 5 mars 1797 une poignée d'hommes et de femmes envoyés par la London Missionary Society pour apporter la Bonne Parole dans le Grand océan.

Le titre austère de cet ouvrage annonce de fait un tournant dans l'histoire du Pacifique ; désormais il sera impossible de continuer à écrire une histoire simpliste du contact, réduite au images du bon sauvage ou du missionnaire destructeur d'idoles. L'auteur renouvelle notre perception de Tahiti et, prenant comme fil directeur l'histoire de la traduction de la Bible en langue maohi, il nous rappelle les bases de l'écriture des Ecritures.

Les nouvelles valeurs, l'écriture que les missionnaires enseignent aux enfants de la tradition orale, tout cela va bouleverser le moyen de penser et les modes de la pensée : au cœur du changement démographique, économique et social du royaume des Pomare nous assistons à la naissance d'une tradition et d'un nouvel art de vivre.

La traduction complète en 1838 de la Bible en tahitien est le signe de ce compromis entre les enjeux de l'au-delà et les joies de l'ici-bas ; la stratégie de l'écriture scelle la maîtrise et le partage de concepts théologiques et métaphysiques antipodaux.

La vivacité du style et l'histoire de la fixation des caractères de l'écriture maohi transforment la lecture en véritable aventure intellectuelle et passionnelle ; elles nous invitent à nous plonger dans l'inconscient de la pensée occidentale et à assister à la genèse d'une nouvelle pensée océanienne, à son fa'ati'a qui ne se veut ni trahison de la Parole ni idolâtrie de la Tradition …
       
Professeur au Pacific Theological College de Fidji, le pasteur Jacques Nicole a soutenu sa thèse de théologie le 12 février 1988 à l'université de Lausanne.
JEAN GUIART : L'aventure de la London Missionary Society dans le Pacifique Sud reste à écrire, non seulement à Tahiti, mais aux îles Cook, à Samoa, aux îles Loyalty et en Papouasie orientale, sans parler de Madagascar et de l'Afrique du Sud. Nous disposons d'autobiographies de missionnaires et d'ouvrages historiques parfaitement bien écrits, grâce à Colin Newbury et à Douglas Oliver. Mais la vie quotidienne de ces missionnaires, le détail de leurs entreprises et celui des réactions et de la collaboration constantes des insulaires, les calculs de ces derniers et de ceux qui se voulaient à jamais leurs patrons spirituels, l'interprétation par  les uns et les autres de la situation nouvelle créée, tout cela reste à étudier par le menu avant d'imaginer de pouvoir proposer la moindre analyse globale nouvelle.

Une des difficultés est le peu de lecteurs des archives de la London Missionary Society, aujourd'hui disponibles sur microfilms à Canberra, Sydney, Wellington et Paris. S'ils ont été si peu nombreux, c'est que les documents sont difficiles à lire, surtout par des chercheurs non préparés, insuffisamment informés et parfois linguistiquement paresseux.

Jacques Nicole s'y est mis au moment voulu, c'est-à-dire après une longue expérience pastorale et pédagogique en Polynésie Française et au séminaire évangélique de Fiji. Le résultat est passionnant, en particulier parce que, pour  un dossier précis et cohérent, celui des traductions bibliques successives, il casse les images apologétiques de la littérature missionnaire et nous révèle dans leur réalité les hommes et les femmes de la LMS, avec leurs enthousiasmes, leurs déceptions, leurs ambitions, leurs opportunismes et leurs mesquineries, c'est-à-dire comme des êtres de chair et de sang et non plus comme les héros que l'on proposait dans la première moitié du XXe siècle à l'admiration de la petite et moyenne bourgeoisie anglaise, ainsi qu'à la vénération des foules tahitiennes.

À la lecture de cet ouvrage, la Bible en tahitien — dont la portée fut immense dans la région et au-delà — n'est plus le résultat de la complicité quasi miraculeuse entre le missionnaire Nott et le roi alcoolique Pomaré II, mais le résultat de décennies d'essais et d'erreurs de la part de linguistes improvisés, d'accusations réciproques d'incompétence, mais aussi de tentatives partielles se succédant et s'appuyant l'une l'autre et aboutissant à un ouvrage fini, comme si la volonté divine avait malgré tout triomphé de la petitesse des hommes.

(…)

L'histoire de la christianisation de Tahiti est celle d'une suite d'abandons culturels par les Polynésiens en vue d'acquérir la faveur de leurs maîtres nouveaux et de se protéger des formes outrancières de domination coloniale ayant cours ailleurs. Ils ont effectivement réussi à se protéger et à survivre en tant que peuple. Le jugement que la Bible a été si intégrée dans leur culture qu'elle en représente leur acquis essentiel est pour le moins une conclusion douce-amère.

 Journal de la Société des océanistes, 1993, Vol. 96, Numéro 1 (pp. 105-114) — note de lecture [en ligne]
autre point de vue sur l'ouvrage de Jacques Nicole : Pierre-Yves Toullelan, Revue française d'histoire d'outre-mer, 1989, vol. 76, 284, (pp. 348-349) — [en ligne]
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • « Au pied de l'écriture, histoire de la traduction de la Bible en tahitien » nouvelle édition augmentée, Papeete : Haere pō, 2018

mise-à-jour : 21 novembre 2018
Jacques Nicole : Au pied de l'écriture
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