Eugène Nicole

Retour d' Ulysse à Saint-Pierre

L'Olivier

Paris, 2017
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N.E. of America

parutions 2017

Retour d'Ulysse à Saint-Pierre / Eugène Nicole. - Paris : L'Olivier, 2017. - 197 p. ; 21 cm.
ISBN 978-2-8236-1214-1
… à Sandymount, au sommet de la tour Martello, je me sens chez moi, …

p. 91

Quand, à l'improviste semble-t-il, Eugène Nicole affirme se sentir chez lui à Sandymount, au sommet de la tour Martello, il accrédite l'existence d'un lien sensible entre la vie ordinaire — la vraie vie ? — et ses prolongements dans l'espace ouvert par la littérature. La proposition doit être entendue, émanant de qui se présente comme le “ galérien de L'Œuvre des mers ” (p. 93), quelqu'un qui a consacré plusieurs décennies à la “ matière saint-pierraise ” (p. 35), un homme ancré dans une géographique étroitement circonscrite, au point que Paris ou New York, par exemple, n'apparaissent plus que comme de lointaines excroissances d'un centre.

En ouvrant une ligne directe entre Saint-Pierre et Dublin, entre l'enfance vécue et le monde rêvé dans les livres, Eugène Nicole éclaire une veine qui court depuis les débuts de son œuvre où les souvenirs de lecture ne manquent pas — jamais comme marques d'érudition, toujours comme témoignages facilitant la poursuite, dans un imaginaire partagé, des accidents et émotions du quotidien. Ainsi, évoquer la “ belle marinière ” rencontrée par Chateaubriand en 1791 (p. 146), permet à Eugène Nicole de guider son lecteur vers une embellie : “ Comme on est bien ici ! ” (p. 147).

Ecrit à l'occasion d'un énième retour dans l'archipel, “ Retour d'Ulysse à Saint-Pierre ” met en parallèle l'action du temps sur les lieux — souvent destructrice, et les pouvoirs conjugués de la mémoire et de la littérature — inépuisables ressorts de vie.
EXTRAIT    Je me souvins […] que, six mois plus tôt, l'avion qui me ramenait de Paris à New York était passé au-dessus de Cabourg, ce qui m'a fait repenser à une page d'À la recherche du temps perdu où, parlant de Bergotte, le narrateur compare l'écrivain au possesseur d'une voiture automobile qui “ serait capable de convertir en force ascensionnelle sa vitesse horizontale ”. Stupéfait, j'ai cru que mon corps devenait une statue de plomb, que nous allions tous piquer du nez. Car enfin, c'est par une métamorphose semblable que commence L'Œuvre des mers ! Alors que, le 20 mai 1927, à la douzième heure de son vol historique, le Spirit of Saint-Louis de Lindbergh, en route pour Paris, survole l'extrémité sud-ouest de l'archipel, simple d'esprit et ne connaissant rien des progrès de l'aviation, la Terre-Neuvienne Gabie, qui était allée cueillir des graines à Savoyard, laisse tomber sa casserolle et s'enfuit à toutes jambes, ayant cru voir dans les airs la Peugeot brune de M. Télo 1 qui est alors la seule voiture de l'île ! N'était-il pas étrange qu'ayant lu plusieurs fois l'œuvre de Proust je n'aie jamais fait le rapprochement ? Ainsi, mon “ Prologue dans le ciel ” comportait une inconsciente référence à l'écriture ?

Le banc de Saint-Pierre, 3, pp. 96-97
       
1. Plus loin, une interlocutrice corrige l'auteur : “ Vous savez … que la SPM 1 [la première voiture immatriculée dans l'archipel] ne fut pas une Peugeot brune mais une Ford T, qui n'appartenait pas non plus à M. Télo mais à M. Louis Laignox ? ” — Le banc de Saint-Pierre, 4, p. 107
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • « L'Œuvre des mers », Paris : Françoise Bourin, 1988 ; Gallimard (Folio, 2171), 1990 [première version]
  • « Les larmes de pierre », Paris : Françoise Bourin, 1991 ; Gallimard (Folio, 2552), 1993
  • « Le caillou de l'Enfant-perdu », Paris : Flammarion, 1996
  • « L'Œuvre des mers », Paris : L'Olivier, 2004 ; Paris : Points (P1765), 2007 [version élargie]
  • « L'Œuvre des mers », Paris : L'Olivier, 2011 [nouv. version élargie]

mise-à-jour : 20 novembre 2018
Eugène Nicole : Retour d'Ulysse à Saint-Pierre
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