Hervé-Masson,
rétrospective [catalogue de l'exposition : Mahatma
Gandhi Institute, île Maurice, 16 juin-2 juillet 2005]
/ sous la dir. de Barbara Luc et Bernard Lehembre. - Paris :
La Maison des Mécènes, 2005. - 120 p. ;
ill.
ISBN 2-9522832-1-4
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Hervé Masson est né
à Rose-Hill le 17 janvier 1919 dans une famille d'origine
lorraine, les Masson-Abraham établis à l'île
Maurice depuis 1753. Il est le cadet de sept enfants dont l'aîné
est le poète et romancier Loys Masson. Tout jeune, il
baigne « dans l'univers magique des nénènes
malgaches qui s'occupaient de lui et de ses frères et
sœurs, nénène Zita, nénène Argentine
et nénène Berthe » 1.
Cette enfance, ouverte au mystère du monde, marque sa
personnalité comme le fera plus tard l'amitié —
avec le poète Robert-Edward Hart, avec Malcolm de Chazal
ou Marcel Cabon. C'est pour illustrer les œuvres de son frère
Loys puis celles de Malcolm de Chazal qu'il s'essaie à
la gravure ; il n'a alors que dix-neuf ans.
Les organisateurs de la rétrospective
mauricienne distinguent trois époques dans la trajectoire
artistique d'Hervé Masson.
C'est en plein cœur des années
de formation (1942-1959) qu'Hervé Masson s'installe
en France ; il y approfondit ses recherches et se tourne
vers la nature morte ; on note la disparition des couleurs
vives au profit de teintes monochromes terreuses.
Les quinze années qui
suivent (1960-1975) sont celles de la consécration.
Ses œuvres sont exposées à Paris (Bernheim-Jeune)
puis à New York (Alberto Cernuschi). Il regagne l'île
Maurice ; sa peinture se dépouille, la couleur y
est de nouveau exaltée.
Les dernières années
(1976-1990) sont marquées par l'expérimentation :
nouveaux essais abstraits, retour sur les œuvres de ses débuts.
Soucieux d'inscrire son œuvre dans l'histoire de l'art, il
revendique son appartenance à l'orphisme — tendance
du cubisme exaltant la couleur dans la lignée de Robert
et Sonia Delaunay.
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HERVÉ MASSON : […]
Pour moi, le sujet est d'importance
secondaire, l'expression ou les expressions sont sacrifiées.
L'objet représenté n'a que la valeur d'un simple
témoin. Peu m'importe qu'un visage exprime la joie ou
la colère ou l'étonnement, cela ne présente
aucun intérêt. C'est la relation entre ce visage
et les autres parties de mon tableau que je cherche à
établir. C'est le prolongement de l'homme dans la nature,
du mouvement dans la stabilité, du premier plan dans le
dernier que je veux traduire. C'est encore la haute magie, la
théurgie profonde et universelle qui se cache dans toutes
choses qui cependant scintille à mes yeux et à
la vision de laquelle je ne peux me dérober.
[…]
☐ « Le Cernéen-Advance-Le
Mauricien », 8 février 1947
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MARCEL CABON : Comment peint-il ? Plus
du tout comme il peignait à Maurice. Il peint signifiant,
comme on dit dans le jargon du Faubourg Saint-Honoré.
C'est un figuratif. Il a redécouvert la beauté
des choses simples — qui, d'ailleurs ne sont pas aussi simples
que ça ! La beauté des plantes, des bêtes,
des objets, de la femme, bien sûr. Mais l'art est une abstraction
(c'est Gauguin qui le premier s'en aperçut) et l'ancien
(?) expressionniste Hervé Masson s'en souvient chaque
fois qu'il s'installe devant le bougran.
Il peint des paysages bretons,
des églises de la Brie et du Gâtinais, des femmes
qui semblent faites pour illustrer (magnifiquement) Les femmes
damnées de Baudelaire. Comme Picasso, comme Simon Segal
dont son frère raffole et Bassano aussi, il peint inlassablement
des chèvres. Mais il les peint à sa manière.
Segal est un faux naïf qui fait des toiles merveilleuses.
Masson est un mystique intelligent doublé d'un voluptueux.
Les chèvres qu'il peint sont d'une plénitude souveraine.
On songe à Théocrite, mais aussi à Paul
Arène.
Il a une pâte généreuse,
sensuelle, véhémente ; sous le couteau, des
traînées de grains d'une épaisseur et d'une
tonalité qui ravissent l'œil et l'esprit. J'ai vu de
lui des verts matinés de blancs, des rouilles, un rouge
de ketmie, des gris d'automne finistérien, des bleus de
soleil estival sur les vieilles pierres de Notre-Dame. Il peint
avec force, moitié pour s'exprimer, moitié comme
on fait des haltères.
☐ « Le Mauricien »,
1957
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COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE | - Hervé Masson, « Implosions »,
Paris : Éd. Caractères, 1980
- Hervé Masson, « Les
heures bleues du capricorne », Toulouse : L'Ether
vague-Patrice Thierry, 1988
| - Bernard Lehembre, « Masson,
Hervé dit Hervé-Masson, peintre et homme politique
de l'île Maurice, 1919-1990 », Paris :
L'Harmattan, 2005
- Georges André Decotter,
« Panorama de la peinture mauricienne »,
Rose Hill (Maurice) : Éd. de l'océan Indien,
1986-1989
| Plus d'information
sur Hervé Masson et son œuvre :
http://www.hervemasson.org |
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mise-à-jour : 3 octobre 2005 |

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