Maylis Besserie

Le Tiers Temps

Gallimard

Paris, 2020

bibliothèque insulaire

   
Irlande
parutions 2020
Le tiers temps / Maylis Besserie. - Paris : Gallimard, 2020. - 181 p. ; 21 cm. - (Collection Blanche).
ISBN 978-2-07-287839-8
Le silence bruyant de la vieillesse dans sa dernière demeure.

p. 83

Le Tiers Temps — c'est la maison de retraite dans le quatorzième arrondissement de Paris 1 où Samuel Beckett, après la mort de sa femme Suzanne, a séjourné durant les derniers mois de sa vie.

Maylis Besserie imagine dans ce “ roman ” impressions et souvenirs qui tentent de contrer le vide d'un confinement déshumanisant et de faire front face à la mort qui approche. Tantôt le narrateur s'agace de paraître, à ses propres yeux, “ pas tellement différent du caniche ballot, le vieux auquel on confie ses petites opinions sur les choses ” ; il s'irrite quand le corps se dérobe ; et se prend, aux heures sombres, à partager les rêves de Vladimir et Estragon, “ ils rêvaient de se pendre pour de bon. De danser au milieu des feuilles … ”.

Les bons (?) moments sont propices aux souvenirs : l'Irlande — au pied des montagnes de Wicklow se dressent les figures du père, de la mère, May qui enrage, écume, foudroie ; quelques amis sont à jamais proches : Joyce ou Jack B. Yeats le frère du poète.

Cette conscience qui s'évade et s'égare éclaire les ressorts les plus profonds d'une œuvre couronnée en 1969 par le Prix Nobel de littérature.
       
1. La maison est située rue Rémy-Dumoncel ; en 1938 Samuel Beckett avait été blessé d'un coup de poignard à l'angle de cette même rue. À noter encore qu'Henry Thomas a fini sa vie au Tiers Temps, quatre ans après Beckett, en 1993. — Cf. Antoine Perraud, “ Beckett rattrapé par son théâtre ”, La Croix, 12 février 2020 [en ligne]
EXTRAIT Rue Dumoncel, je n'entends pas les mouettes. Je n'entends même plus Suzanne. Je n'entends plus rien. J'entends seulement ce que j'ai déjà entendu.

J'ai froid sous ma couverture. Il faut que je pense à une chanson.

Bid adieu, adieu, adieu,
Bid adieu to girlish days.

La voix de Joyce. It warms my heart. La voix de Joyce sous ma vieille couverture. Il fait de la musique, même quand il écrit. Ses pieds volent sous le piano, d'une pédale à l'autre. Joyce fait de la musique et chante avec l'accent de Cork. L'accent de son père. De beaux restes de ténor. Il chante pour les amis : les Jolas, les Gilbert, les Léon ; il chante pour Nino. Je l'écoute saoul — sous la table. La maison vibre, une fille danse. C'est la fille, celle de Joyce : Lucia. Je ferme les yeux. Lorsque Joyce achève le spectacle, il se lève sur ses trois pieds : les siens et sa canne de frêne. Il salue et aussitôt demande à boire. Il est irlandais.

p. 13
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • Samuel Beckett, « En attendant Godot », Paris : Éd. de Minuit, 1991
  • Samuel Beckett, « Molloy », Paris : Union générale d'éditions (10/18, 81-82), 1971

mise-à-jour : 2 avril 2021
Maylis Besserie : Le Tiers Temps
   ACCUEIL
   BIBLIOTHÈQUE INSULAIRE
   LETTRES DES ÎLES
   ALBUM : IMAGES DES ÎLES
   ÉVÉNEMENTS

   OPINIONS

   CONTACT


ÉDITEURS
PRESSE
BLOGS
SALONS ET PRIX