KIRINO Natsuo

L'île de Tôkyô

Seuil

Paris, 2013

bibliothèque insulaire

   
Autour du Japon
des femmes et des îles
îles désertes
parutions 2013
L'île de Tôkyô / Kirino Natsuo ; traduit du japonais par Claude Martin. - Paris : Seuil, 2013. - 281 p. ; 22 cm.
ISBN 978-2-02-103471-4
 … puisqu'il y avait aussi beaucoup de cocotiers, l'île était riche en nourriture.
À part qu'elle était inhabitée et que les secours n'arrivaient pas, on pouvait dire que c'était un paradis.


p. 13

Après avoir fait naufrage, un couple de plaisanciers japonais a trouvé refuge sur une île déserte du Pacifique, au large des Philippines mais à l'écart des grands courants de navigation. Trois mois plus tard, ils voient débarquer une équipe de jeunes Japonais qui tentaient de fuir l'île également inhabitée où ils participaient à une expérimentation scientifique ; plus tard encore, des marins chinois naufragés viennent grossir le groupe de rescapés.

Dans l'incertitude d'un secours rapide, ces Robinsons expérimentent une vie sociale rudimentaire dont les fondements sont mis à rude épreuve par les différences d'âge, d'aptitudes, de nationalité, de préjugés surtout. La présence de la seule femme, Kiyoko toujours séduisante, va compromettre tout l'espoir d'une cohabitation paisible. Tant qu'il ne s'agit que d'organiser la survie matérielle des uns et des autres, les difficultés peuvent trouver des solutions ; mais l'harmonisation des relations interpersonnelles s'avère moins simple.

Des clans se font et se défont. Des affinités se nouent et se dénouent. Des hiérarchies se constituent. Des rites sociaux s'élaborent. Des pouvoirs — techniques, économiques — tentent de s'imposer. Mais Kiyoko, convoitée ou rejetée, cristallise les rancœurs et les frustrations — surtout quand il s'avère qu'elle est enceinte.
EXTRAIT    « Je veux de la glace, je veux boire du Pocari sweat bien frais, je veux me gaver de pastèque glacée ! » N'y tenant plus, Kiyoko se précipita hors de sa cabanne. Mais devant ses yeux il n'y avait que le ciel bleu, et la jungle dense et touffue. La forêt dégageait une odeur végétale très forte. Tant qu'on était sur cette île, il n'était pas possible d'échapper à cette astmosphère écrasante de chaleur. « Je veux vite partir d'ici », pensa Kiyoko. Qu'étaient devenus ses beaux raisonnements sur sa grossesse comme expression de la volonté de l'île ? Selon lesquels elle allait accoucher de l'enfant de l'île, qu'elle-même serait l'île-mère ? Le bonheur suprême qu'elle avait ressenti à ce moment-là n'était-il que l'expression de ses hormones ? Si elle crevait d'envie de boire quelque chose de glacé et de sucré, n'était-ce dû qu'aux hormones ? Torturée par les hormones. Non, torturée par l'île. Les pensées de Kiyoko allaient en tous sens : plus elle se dispersait, plus elle se sentait mélancolique, et plus elle était mélancolique, plus son désir de nourriture se renforçait, impossible à satisfaire, ce qui l'irritait et rendait la situation inextricable. Sa frustration colossale la paralysait.

   Cela la mettait hors d'elle d'être tombée enceinte. Quelle bêtise de croire que cela pourrait donner un sens à sa vie ! Fallait-il risquer de mourir pour cela ? C'était une pure folie d'accoucher sur une île déserte.

pp. 165-166
COMPLÉMENT BIBLIOGRAPHIQUE
  • « 東京島 (Tôkyô-jima) », Tōkyō : Shinchōsha, 2008

mise-à-jour : 22 septembre 2013

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